Anthracite : octobre 49-janvier 1950 avec le II/1e RCP

En septembre 1949, la 8e Compagnie est de servitude à la Citadelle d'Hanoï, alternant gardes, patrouilles et quartiers libres : la vie civile a du bon, et, du Foyer du Soldat au Pont Doumer, la rue appartient aux paras, durement marqués par un an d'opérations...





Pas sûr qu'ils parviennent à oublier les images trop cruelles d'un an d'opérations, et tous les bons copains partis... Alors malgré les bagarres avec les bérets rouges, quand la St-Michel est célébrée à la cathédrale, que retentit la Prière du Para, ou bien à l'occasion d'une cérémonie au cimetière militaire, les souvenirs débordent parfois...


Les folles nuits de bagarres avec les marsouins s'achèvent pourtant  en octobre avec le début de l'opération Anthracite : la 8 est d'alerte le 17 octobre après-midi, le lendemain matin, les paras décolleront de Bach-Mai, pour sauter sur Nam-Dinh, à l'extrémité sud-est du delta...

Il s'agit d'aller dégager une importante et riche région, entre l'embouchure du Fleuve Rouge et la frontière d'Annam,  peuplée très majoritairement de catholiques, que l'avance viet-minh menace.


On ne s'habitue jamais au saut opérationnel, surtout lorsqu'il est reporté à plusieurs reprises, pour cause de mauvaise météo, ou parce que la DZ est inondée. Ce n'est que le 19 que les JU-52 décollent définitivement et, survolant Bach-Maï, s'orientent sur Nam-Dinh.


Les turbulences sont fortes, annonçant des largages mouvementés ; la DZ de remplacement, c'est le terrain de football municipal, bordé par le cimetière et la grande usine textile de la Cotonnière. Il faut donc larguer serré, deux par deux en passages interminables pour la 8, et trois par trois pour l'Escadron...

La population de Nam-Dinh accourt pour saluer ses sauveurs qui ont du mal à arriver sains et saufs : un para a fait une torche, main crispée sur la poignée du ventral (saut à 200 mètres...), plusieurs autres ont touché les pierres tombales...


Après regroupement, les bérets-bleus passent la nuit à la Cotonnière, où par suite des destructions viets, la production ne dépasse pas 20% de l'activité d'avant-guerre.


Puis le lendemain, direction l'embarcadère et les LCT  pour gagner Phat Diem par le Nam Dinh Giang.

Trés intéressant Georges ! Et les "pièces jointes " sont un bon  complément pour  le texte .

Les lecteurs silencieux te remercient une fois encore !  

Terrible en effet cette principauté guerrière de Phat Diem que les paras, débarquant du Song Day, découvrent avec curiosité ; il s'agit d'une vaste région marécageuse en bordure du golfe du Tonkin, cernée de collines, où de gros bourgs constitués d'innombrables paillotes accueillent un million de catholiques tonkinois ; les fidèles ont élevé là, sur des lacs de boue profonds de 30 mètres, d'incroyables églises fortifiées,


et leur chef suprême, c'est un Prince-Evêque, dont la soutane s'orne d'une ceinture-baudrier, des insignes du grade de Commandant, et d'un badge comportant une mitre et des clés croisées : Monseigneur Le-Huu-Tu


Il dispose, pour protéger ses ouailles, de 2 bataillons de troupes régulières à 1700 hommes, et de 5 bataillons de miliciens ; l'Evêché possède même une station de radio, car il ne prend ses ordres... qu'auprès du Vatican...

Beau travail en effet ! Très bien illustré.

Il semble que l'histoire de Phat Diem ait laissé des traces dans celle du 1er RCP....

Chapeau Georges pour l'illustration, la carte me rappelle un peu le primaire...

Que la France était "grande" à l'époque...

Merci... pour la carte, pas moyen d'en trouver une bien détaillée comme pour la région d'Hanoi...    mais je cherche...  

Lothy: " Il semble que l'histoire de Phat Diem ait laissé des traces dans celle du 1er RCP...."  
 évoques-tu la salle d'honneur du Régiment? ... la mort de Bernard de Lattre à Ninh-Binh?

Je n'ai pas encore eu le privilège de visiter la Salle d'Honneur du régiment, ça viendra peut-être.

Mais dans les mémoires, cette bourgade a laissé des souvenirs. Ainsi que dans plusieurs livres....

Je vais voir si j'ai une carte mieux détaillée.

La Compagnie Audema prend son campement à Yen Binh, le village le plus au sud, proche des collines boisées de Tam Diep, qui marquent la frontière entre leTonkin et l'Annam..
Voici deux cartes pour tenter de suivre son itinéraire:


Le 21 octobre, les paras quittent Yen Binh et se dirigent vers les collines et la zone de contact avec les viets ; une foule de plusieurs milliers de catholiques les suit, comme pour les encourager, mais les fidèles s'éloignent dès qu'explosent les premières mines, au pied des collines boisées : les viets sont là, ils ont piégé tout le piémont. Toutefois le contact n'est pas trouvé, et la 8 s'installe provisoirement à Binh-Sa, le village le plus au sud de l'Evêché.
C'est le 24 à l'aube que les viets sont  repérés posant de nouvelles mines aux abords de la frontière ; les hauteurs retentissent du fracas des bombardements aériens et des tirs d'artillerie, tandis que les paras cherchent le contact. Après un tir nourri, les rebelles profitent d'un arroyo qui bloque provisoirement la 8 pour décrocher vers leurs refuges des sommets...

Bonjour,

Pour suivre un peu sur le terrain la progression de nos valeureux paras, je me suis connecter sur Google Earth, un seul petit problème, dans les noms de village beaucoup d'homonyme, faut donc choisir la province... ce qui n'est pas évident non plus, alors tu navigues sur la carte Google... Tu reviens sur la carte de Georges dans le sujet, tu compares....

Attends, là je suis trop haut.... Là je suis trop bas et là je suis trop à côté... 
C'est passionnant   

Non seulement c'est passionnant, mais ça occupe les anciens qui retrouvent peut être des endroits ou des paysages de leur jeunesse.

N.B.: Pour le Parc à Buffles, je n'ai pas encore eu le temps de visiter sur Google...   

Bien vu, Le Béarnais, c'est difficile mais ça apporte beaucoup... René Collard et Fleury ne disent pas tout, même 50 ou 60 ans après: il faut protéger ces gens qui restent des persécutés, malgré le développement du tourisme et la cascade de pourboires qui arrose qui de droit...
J'ai trouvé une carte "variolée" , l'EM appelait "point de variole"  chaque village touché par le viet-minh: on voit bien la région de Phat-Diem nettement plus en blanc dans ce Tonkin sud extrêmement peuplé, même par rapport à la région Hanoi-Haiphong...



On se rend compte que l'Evêque et ses ouailles sont cernés: ça arrive par Nam-Dinh, par Ninh-Binh, les bataillons légers des catholiques commencent sûrement à être surclassés par les réguliers viets qui sont approvisionnés par les TD, les usines clandestines... d'où l'appel au secours en direction des Français, et des professionnels de 20 ans que sont déjà les gars du 1e RCP...

Merci de ton récit Georges

Pour une variole... c'est une variole !

Mon idée de Google Earth, n'a pour d'autre objet que d'apporter un regain d'intérêt à ton passionnant sujet.

J'ai ainsi eu l'occasion de visiter DBP à travers ce navigateur, l'ETAP à Pau, les plages de Normandie, Bastogne et j'en passe et des meilleurs.

Perso, je trouve que lire ton récit, tes cartes et transposer le tout sur le "terrain" par ce navigateur rend ton récit plus vivant et la couleur en plus... Manque plus que la musique et les congaïs...

C'est quand la prochaine perm de détente ?

On peut faire confiance à l'ami René... Collard   : même quand il n'est pas en détente à Doson, il fait toujours des rencontres, peut-être pas aussi classes ni aussi saïgonnaises que celle-ci,    mais... (à suivre, un peu plus tard...)

C'est ce que l'on appelle joindre l'utile à l'agréable !....   

En naviguant avec Google, vous avez une vision des lieux, c'est certain.... Mais certainement pas la même que celle qu'ont eu les "p'tits gars" des bataillons du 1er RCP, ou autres unités impliquées...

Dien Bien Phu en est un exemple flagrant... Il doit en être de même pour bien des villes....

Lothy, STP...

Ne nous enlève pas le charme d'un rêve et/ou une facette de notre imagination  

georges a écrit:

Merci... pour la carte, pas moyen d'en trouver une bien détaillée comme pour la région d'Hanoi...    mais je cherche...  

tu devrais en trouver dans certains textes sur le forum dans la rubrique "indo"
le Boss a du en mettre ...

En début d'après-midi, la compagnie Audema remonte au nord vers Yen Mo en suivant la lisière des collines sur la gauche et en fouillant les hameaux désertés, truffés de pièges, où les attendent de petites sections de bo-dois qui font le coup de feu, perdent quelques unités, tués ou prisonniers, puis s'esquivent.
Le manège de sang égrène ses corps sur la piste des paras... Le 25 octobre, ils sont à Phuc-Nhac, en lisière de l'Evêché, sur la piste qui va à Ninh-Binh ; on entre en territoire hostile, il faut faire encore plus attention, empêcher les gamins d'approcher, éloigner les gardiens de buffles dont la longe est peut-être un fil-piège...



Dans la rizière au nord, en direction de Yen Ninh, il y a des mouvements suspects sur la lisière... Les paras s'avancent dans la boue gluante...


Et tout explose ! Obus de mortiers, grenades à fusil, pleuvent sur les paras, qui s'abritent comme ils peuvent, tandis que le lieutenant Audema demande un appui aérien, fait cracher ses mortiers et envoie le plus gros de la compagnie en large débordement sur les côtés. La manoeuvre réussit bien tandis que les viets s'acharnent sur le bouchon, ils se font prendre au dos au moment où deux Spits plongent sur eux ! La surprise est totale, la fuite impossible : cinquante bo-dois gisent au bord de la rizière et quinze prisonniers gagnent l'arrière du dispositif...
Le nettoyage de la région prend fin le 30 octobre, au terme d'un vaste mouvement tournant vers le Song Day. Dans la soirée qui s'avance, les paras avancent péniblement au milieu d'un océan de boue


La marche des colonnes est émaillée de chutes dans les trous d'eau, ponctuée des tirs nerveux des miliciens catholiques à l'approche des postes ; parfois même le sourd martèlement d'un buffle éveillé en sursaut, qui fonce sur les soldats, et c'est toute la section qui dégringole de la diguette...


Les paras atteignent enfin le point de rassemblement à Yen Tho le 30 octobre vers minuit et s'écroulent, fourbus. Ce qui ne les empêchera pas, les jours suivants, de profiter des beautés de la cité épiscopale. René Collard et ses collègues découvriront parmi leurs nouveaux amis de Phat Diem l'ambiance particulière des fumeries d'opium...


De la mémoire de René jamais ne s'effacera le souvenir ému d'un certain quartier de Phat Diem, retrouvé bien des années plus tard


où, dans le crépuscule il attendait sa chance, au bord du canal... Derrière lui, les paillotes, et la grande statue tendant ses bras... Du sampan-maison, une jeune fille s'avance vers René


Elle sourit et sur sa poitrine la petite croix dorée accroche les lueurs fugitives de l'arroyo boueux...
Indochine du rêve et du sang...

En-dehors de ces quelques quartiers libres, le rêve n'a guère eu de place au Bataillon Broizat durant cette opération Anthracite : jusqu'au 15 janvier, date du pliage définitif, 700 km à pied... alertes de nuit, courses folles, plongées dans la boue liquide, pour accrocher trop rarement un ennemi insaisissable, partout où l'alerte est donnée...
Du Day à Yen-Ninh, de Phuc-Nhac à Yen Tho, on passe des plates étendues boueuses aux calcaires truffés de grottes, mais l'ennemi est partout, avec ses pièges, ses grenades lancées de nulle part

Peu à peu, malgré la difficulté du terrain, les paras imposent leur vitesse de réaction, leur capacité de manoeuvre ; les viets se font accrocher, perdent du monde, dans des affrontements sans concessions...

C'est le prix à payer pour qu'à Phat Diem on vive en paix... L'année 1950 commence...

Merci Georges, on "boit" ton récit comme du petit lait...

Merci Charly; c'est quasiment impossible de décrire la multitude des interventions du 1e RCP sur Phat Diem: de novembre à janvier, ils sont partout, aux quatre coins de la province, presque toujours à pied, quel exemple !

georges a écrit:

ils sont partout, aux quatre coins de la province, presque toujours à pied, quel exemple !

C'est une particularité de ce régiment, alors formé de trois bataillons.... Ils ont marché à n'en plus finir, même si évidemment, ils ont eu recours aux sauts.... Les avions manquaient !

Le récit n'en est pas moins passionnant.... Merci pour tout ce travail.

C'est mieux en version intégrale....   Les paroles sont ICI

Merci Lothy   : magnifique image d'espoir et d'avenir...

merci Georges pour le récit

Super cette vidéo, par contre la musique est nulle...

Le Béarnais a écrit:

Super cette vidéo, par contre la musique est nulle...

Comment ça, la musique est nulle ?....  

Cela n'engage que toi ! J'aime ce chant ; il est "moderne". 
J'ai entendu beaucoup plus laid....

Le Béarnais a écrit:

Super cette vidéo, par contre la musique est nulle...

pas d'accord avec toi bearnais....

A Charly et à Lothy, c'est votre droit de ne pas être d'accord avec moi, moi je considère que le chanteur de cette vidéo et un braillard, quant à qualifier cette musique de "moderne"... Désolé pour vous.

D'abord pour vous, c'est quoi une musique moderne ?  C'est la musique de NTM et Cie ? C'est la musique de Céline Dion ou celle de G. Brassens plus veillotte  mais plein de charme et de poésie ? 

Une musique un peu plus symphonique m'aurai parut plus adapter,  vous vous voyez regarder le film sur DBP avec un gueulard pareil en lieu et place de la musique du film ? Moi pas !

Mais à chacun ses goûts.  

Le Béarnais a écrit:

A Charly et à Lothy, c'est votre droit de ne pas être d'accord avec moi, moi je considère que le chanteur de cette vidéo et un braillard, quant à qualifier cette musique de "moderne"... Désolé pour vous.

D'abord pour vous, c'est quoi une musique moderne ?  C'est la musique de NTM et Cie ? C'est la musique de Céline Dion ou celle de G. Brassens plus veillotte  mais plein de charme et de poésie ? 

Une musique un peu plus symphonique m'aurai parut plus adapter,  vous vous voyez regarder le film sur DBP avec un gueulard pareil en lieu et place de la musique du film ? Moi pas !

Mais à chacun ses goûts.  

... Sauf erreur de ma part, je crois comprendre que tu n'es pas d'accord ?         

Charly, j'ai le plaisir de t'annoncer que tu as tout compris...   

En récompense, tu as gagné un W.E. en compagnie de Lothy dans un chalet en montagne entouré d'un silence et d'un cadre pastorale, avec pour seul bruit, à part le bruit des cloches des brebis des environs, une musique d'ambiance durant votre séjour et votre tête à tête, la votre de "musique moderne"...   

J'espère pour vous, que votre agréable séjour ne part pas en tête à queue pour cause de musique moderne...  

Le Béarnais a écrit:

J'espère pour vous, que votre agréable séjour ne part pas en tête à queue pour cause de musique moderne...  

oh !!!shocking !!!!    

Hey ! Les hommes.... Si vous n'y voyez pas d'inconvénients, je réserve mes weekends à qui je veux....  

Et même s'il porte un couvre-chef accessoirement, il a l'exclusivité absolue.... De plus, il aime le chant du 1er RCP

  

Je sais bien que la "Métro" a nettement moins bon goût que la "Colo", mais je ne vois pas le rapport avec NTM ou encore Céline Dion avec ce chant enregistré par la 3e Cie du 1er  

Par respect pour Georges et à son sujet pour ne pas le polluer, je me refuse de répondre à des provoc de bas étage d'une femme, sectaire en plus, car Charly est un ancien combattu bien sous tout rapport, ses posts en témoignent, et là, Lothy refuse de lui remettre la "coupe" du 1er prix hors concours dans le Domaine -chant et musique- régimentaire. C'est scandaleux...

Et après ça, elle vient nous dire qu'elle aime bien nos anciens.

je vais donc changer d'époque  et essayer un sujet sur l'anti-sniping à Sarajevo en 1994... à bientôt  

Le Béarnais a écrit:

Et après ça, elle vient nous dire qu'elle aime bien nos anciens.
 

Eh oui je les apprécie énormément, j'ai même le droit d'en apprécier un tout particulièrement....   

Aurais-je des comptes à rendre Messieurs ?

georges a écrit:

je vais donc changer d'époque  et essayer un sujet sur l'anti-sniping à Sarajevo en 1994... à bientôt  

Salut Georges,

A bientôt pour lire tes nouvelles aventures à défaut de lire celles de Lothy et de Charly "ex-snipper..." en W.E. dans un chalet...