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La bataille de Saumur du 18 au 20 juin 1940
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Lors de la bataille de Saumur du 18 au 20 juin 1940, 2500 soldats français dont 800 jeunes officiers se sont battus héroïquement alors que le maréchal Pétain avait annoncé l’arrêt des combats.
Pendant deux jours, du 18 au 20 juin 1940, les
« cadets de Saumur », surnom donné par le
général Kurt Feld qui commandait la division allemande, opposèrent aux troupes du Reich une résistance héroïque.
Issus de l’école de cavalerie de Saumur, les élèves officiers manquaient d’expérience et n’avaient que peu de matériel si ce n’est leurs armes d’instruction. Une cinquantaine d’entre eux est tuée. «
’Tout est perdu, fors l'honneur’, avait dit un jour le roi François 1er, au lendemain de la bataille de Pavie. À quatre cents ans d'écart, les cadets de Saumur firent résonner les armes à la main cet écho de l'histoire».
À Saumur, où sont en cours de formation les jeunes EAR de Cavalerie et du Train, tous entendent, les larmes aux yeux, ce qu'ils refusent de considérer comme un épilogue. Le
colonel Michon, grand blessé de la guerre de 14 qui commande alors l'école de cavalerie, entend lui aussi cette déclaration faite
«le cœur serré» et ne l'accepte pas plus que ses élèves.
Il a reçu la mission d'empêcher le franchissement de la Loire sur une zone de quelque 40 kilomètres et entend bien la remplir. Il convoque les cadres et les instructeurs de l'école et leur confirme l'ordre de défendre le secteur de Saumur. La nouvelle est accueillie avec enthousiasme par tous les élèves.
Trois jours héroïques se préparent, qui marqueront à jamais l'histoire de l'école de cavalerie et sont depuis lors inscrits en lettres d'or dans les plis de son étendard:
« Gennes Saumur 1940 ».
Les brigades d'EAR de cavalerie et du train, renforcés par les EAR de l'école d'infanterie de Saint-Maixent, les troupes déjà aguerries du 1er Groupe franc de cavalerie, des éléments du 19ème régiment de dragons, un groupe de reconnaissance de division d'infanterie, des tirailleurs nord-africains, des éléments de l'école d'artillerie et de l'école du génie, sont aux ordres de jeunes et brillants officiers d'active retirés du front pour les former.
A l'un de ses élèves soudainement devenu combattant et qui, recevant ses ordres, lui dit
« mais c'est à la mort que vous nous envoyez, mon lieutenant! » le lieutenant de Galbert, futur gouverneur des Invalides, répondra du tac au tac :
« Je vous fais cet honneur ».
Plusieurs de ces officiers pleins d'avenir, les héroïques lieutenants de Buffévent, Desplats, Roimarmier, tomberont les armes à la main aux côtés de leurs élèves.
Trois jours durant - les combats ont commencé dans la nuit du 18 au 19 - ceux que le général Feldt, commandant la 1ère division allemande de cavalerie, baptisera lui-même les
« Cadets », feront tout ce qui est en leur pouvoir, avec les faibles moyens d'un armement d'instruction vétuste et prompt à s'enrayer, pour empêcher l'ennemi de franchir le fleuve, en commençant par faire sauter tous les ponts.
Mais les Allemands, s'ils ne s'attendent pas à une telle résistance et imaginent avoir des troupes bien plus nombreuses en face d'eux - les Cadets sont partout à la fois - sont 40.000 et, aidés de l'aviation, de l'artillerie et de leurs moyens du génie, parviennent finalement à traverser sur des ponts flottants. Le 22 juin, au petit matin, les Français sont contraints de se rendre. Certains parviennent déjà à s'évader.
Considérant qu'ils ont été faits prisonniers après la signature de l'armistice, ce qui n'est pas tout à fait la réalité, le général Feldt décide le 3 juillet de les libérer et leur donne quarante-huit heures pour rejoindre et passer la ligne de démarcation. Au terme d'une marche de quatre-vingt quinze kilomètres, arrivant sur le pont de Loches pour entrer en zone libre, au pas cadencé et chantant
La Madelon à pleins poumons, les Cadets de Saumur et leurs officiers se voient rendre les honneurs par les soldats allemands gardant la ligne de démarcation.
C'est ainsi que, la veille de l'appel du 18 juin, de jeunes élèves aspirants de réserve, leurs chefs et leurs compagnons d'armes furent les premiers - sans illusion mais avec d'autant plus de panache - à refuser de déposer les armes et de s'avouer vaincus. Quarante-neuf y laisseront la vie.
Régulièrement, on honore ceux qui, en 1944, débarquèrent en Normandie et en Provence pour libérer notre pays, et c'est justice.
N'oublions pas non plus ceux qui, quatre ans plus tôt, mirent autant de courage et d'ardeur à le défendre.
À l'aube d'une douloureuse occupation, le sacrifice des Cadets de Saumur avait sauvé l'honneur.
Source :
Le Figaro