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[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]Les "Coups de Main" britanniques
Dans la nuit du 5 au 6 juin, les premiers avions anglais qui décollent sont des Albermarle, emportant les 60 Pathfinders de la 22nd Independent Parachute Company et des Halifax des 298 et 644 Squadrons, traînant derrière eux les six planeurs Horsa, numérotés à la craie de 91 à 96.
Les trois premiers sont destinés aux ponts sur le canal, les trois suivants au pont sur l'Orne.
A bord des Horsa se trouvent 171 hommes, ainsi répartis :
- D Company, 2nd Battalion, Oxfordshire and Buckinghamshire Light Infantry (Ox. and Bucks);
- deux pelotons de la B Company, 2nd Bn, Ox. and Bucks;
- 30 sapeurs de la 249 Airborne Field Company, Royal Engineers.
L'infanterie aérotransportée est commandée par le Major Howard, les hommes du génie par le Captain Jock Neilson.
La garnison des deux ponts est estimée à une cinquantaine d'hommes, essentiellement des Ost-truppen, mais encadrés par des sous-officiers allemands.
Ils sont armés de quatre pièces de Flak légère (20 mm), de sept mitrailleuses et de deux canons antichars.
Ce ne sont pas là des moyens considérables, mais le Panzer-Grenadier-Regiment 736 se trouve à proximité et son intervention, surtout si elle est soutenue par des blindés, peut être déterminante, au moins tant que les parachutistes ne seront pas sur place.
En fait, dans les premières minutes du combat, le risque le plus grand est que les Allemands parviennent à faire sauter les deux ponts.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Pegasus bridge vue aérienne Le vol, qui débute à 22 h 56 le 5 juin 1944, se déroule sans problème.
Le Horsa de tête se pose à 0 h 16, à seulement 47 mètres du pont sur le canal, sans avoir été repéré par la garnison allemande, dont une sentinelle entend bien un bruit d'écrasement, mais pense qu'il s'agit d'un avion de la RAF abattu.
Les deux autres planeurs viennent se poser derrière le Horsa de tête, mais le 93 s'écrase littéralement au sol.
Son pilote devra être amputé d'un bras, tandis qu'un soldat, coincé dans les débris de l'appareil, se noie dans une mare où repose le planeur.
La bataille qui débute aussitôt après est de courte durée : à peine quinze minutes.
Le lieutenant Brotheridge est mortellement blessé, mais les défenseurs s'enfuient pour aller chercher de l'aide. Il n'empêche qu'à 0 h 30, le pont du canal (aujourd'hui
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]) est entre les mains britanniques.
La prise du pont sur l'Orne
Les atterrissages des trois planeurs destinés à la LZ « Y « , près du pont sur l'Orne, ne sont pas aussi précis, à part celui du Horsa rir 96, qui se pose à proximité immédiate de l'ouvrage. En revanche, le 95 se pose à environ 400 mètres et le 94 encore bien plus loin, près de Périers-en-Auge, à 12 kilomètres de là, non loin de deux ponts pouvant évoquer Pegasus Bridge et son voisin.
Malgré cette dispersion des effectifs, le pont est capturé encore plus vite, sans perte de vies humaines du côté britannique.
Aucune contre-attaque ne se développe avant 7 heures du matin, l'heure tardive à laquelle se présentent des éléments du 7th Battalion, The Parachute Regiment. Dans la matinée, les contre-attaques se multiplient, de la part du 8e Abteilung du Pz. Gr. Rgt. 736. Celles-ci échouent, mais le périmètre défensif est durement pris à partie, jusqu'à l'arrivée vers 13 h 30 du 1st Special Service Commando de Lord Lovat, entraîné par le fameux Bill Millin, jouant « The Black Bear » à la cornemuse.
L'arrivée de ces troupes débarquées le matin même permet de sauver définitivement les deux ponts. Leur capture n'a coûté que deux tués et 14 blessés aux 171 hommes du 2nd Ox. and Bucks.
L'aventure du Captain Kerr
Il a déjà été beaucoup écrit sur les parachutistes britanniques lors de l'opération Overlord...
Attachons nous donc, à décrire l'aventure du Captain Kerr, qui est assez représentative du sort de milliers d'autres paras et qui a l'avantage d'être à peu près inconnue.
Elle provient d’un carton Public Record Office, consacré à la 61h Airbome Division portant la référence WO 106/4315.
Il s'agit en fait d'un témoignage donné par le Captain Kerr, du 12th Parachute Regiment, lors de son séjour au 9th Canadian Hospital, à Horsham, le 22 juillet 1944.
Il est blessé à l'humérus droit et souffre d'un peu de pleurésie.
Le 6 juin 1944, le bataillon de Kerr a reçu une double mission :
- nettoyer Ranville;
- nettoyer la Landing Zone pour les planeurs qui vont suivre en fin de journée.
Arrivé au-dessus de la Normandie, Kerr se prépare à sauter le premier de son peloton. Lorsque la lampe verte s'allume dans le fuselage, Kerr s'élance, puis le pilote comprend qu'il s'est trompé sur sa position et rallume la lampe rouge : le peloton reste à bord et Kerr descend seul.
Il tombe au beau milieu de la Dives et en sort complètement trempé.
Il parvient à identifier à peu près l'endroit où il se trouve et marche jusqu'à une ferme, au sud-est du hameau des Boursiers.
En chemin, il rencontre un parachutiste canadien et deux infirmiers, eux aussi isolés loin de tout.
A la ferme, les paysans français se montrent très suspicieux car ils les prennent pour des Allemands.
A force d'explication, ils comprennent enfin et « furent très contents de nous voir ».
Kerr est tombé trop loin de Ranville pour espérer y parvenir facilement, aussi demande-t-il à ses hôtes de citer les villages les plus proches.
Parmi ceux-ci, le nom de Varaville lui évoque quelque chose : c'est l'un des objectifs de la division.
Un adolescent français se propose alors de guider les quatre hommes à Varaville à travers champs et bois, pour éviter les Allemands.
Ils y arrivent indemnes à 3 h 30 du matin, mais la bataille y fait rage : « Cela semblait le chaos complet à Varaville. On entendait des tirs de Bren et de MG 34 et le fracas des grenades; des voix inconnues criaient en allemand, en russe, en canadien et en anglais et une bataille faisait rage de façon évidente dans le village.»
Kerr voudrait alors gagner Le Mesnil, objectif de la 3e Parachute Brigade.
Mais son français et sa prononciation sont si mauvais que le gamin ne comprend rien.
Il se résout alors à emmener son petit groupe chez une Anglaise vivant près de Varaville.
Elle converse avec eux, leur apprend qu'il n'y a pas d'Allemands à Petiville et le groupe repart.
Il s'est alors renforcé d'un officier de la 3e Para Brigade et de deux soldats de la 9e Para Brigade.
Après Petiville, le garçon leur fait longer un bois pour gagner le Mesnil. Mais ils tombent soudain sur une patrouille allemande de dix hommes, à seulement une vingtaine de mètres de distance :
- Le gamin français est en tête, suivi du capitaine Kerr, puis du reste de la troupe.
Le capitaine Kerr crie « Punch », la seule réponse est une grenade à manche qui tombe presque sur le garçon français, le tuant immédiatement, mais ne blessant personne d'autre, ayant un effet très local. »
Kerr envoie alors une grenade qui n'explose pas : elle est trempée. Les paras tirent à la Sten sur les Allemands qui s'enfuient, laissant l'un des leurs sur le terrain.
« A cause de l'excellent guidage du gamin français, le groupe était devenu plus confiant qu'il n'aurait dû. Choqués par sa mort, ils en tirèrent la leçon et à l'avenir ne se déplacèrent plus qu'en formation de patrouille et avec le plus grand soin.»
Ne connaissant pas la route du Mesnil, ils retournent à Petiville, où des fermiers leur donnent du lait et du pain.
On imagine aussi qu'ils font prévenir les parents de la mort du jeune garçon. Ils sont rejoints sur place par un groupe de deux officiers et 15 sapeurs.
De là, ils se rendent à Robehomme où ils trouvent le Captain Griffith, 45 paras canadiens, un médecin anglais et 12 infirmiers, une équipe antichar et son canon, puis des mitrailleurs Vickers avec leur arme.
Ils sont à présent près d'une centaine, ce qui leur permet de tenter de traverser le bois de Bavent, mais les Allemands y sont si nombreux qu'ils doivent renoncer.
Ils recommencent plus tard et une partie du groupe, y compris Kerr et un pilote de la RAF, parvient enfin à Mesnil à 23 h 30 le 6 juin, après avoir été guidé sur une portion du chemin par un paysan français copieusement ivre pour s'être saoûlé après la destruction de sa ferme par le bombardement naval.
Cette description de la journée du 6 juin par Kerr est intéressante, bien qu'il n'accomplisse aucun exploit particulier, car elle raconte un exemple qui vaut pour des centaines d'autres paras, britanniques ou américains d'ailleurs : une tentative désordonnée pour essayer de se regrouper, de gagner coûte que coûte l'un des objectifs assignés à la division. Cette errance à la merci de rencontres inattendues est typique de la journée du 6 juin 1944
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] St Pierre sur Dives, 6 juin44 Paras SAS prisonniers, ramenés vers l’arrière L’une des raisons de la dispersion des parachutistes est le catastrophique atterrissage des Pathfinders, qui ont touché terre à peu près en même temps que les planeurs destinés aux ponts de l'Orne, mais que le vent violent a déporté loin des zones prévues. Ne disposant que d'une demi-heure avant l'arrivée des premières vagues de parachutistes, ils décident de baliser les DZ là où ils se trouvent plutôt que de chercher l'endroit prévu...
A partir de 0 h 50, les hommes de 5th Parachute Brigade commencent à descendre, mais le vent les déporte eux-aussi vers l'est, de telle sorte que leur dérive s'ajoute à celle des Pathfinders, pour les faire atterrir à grande distance de la zone prévue dans les plans
Chester Wilmot en donne un bon exemple avec le 7th Parachute Regiment :
A deux heures du matin, seulement 200 hommes sur 620 ont pu se regrouper au son du clairon. Ils se portent sans attendre à l'aide des aéro-transportés du 2nd Ox and Bucks.
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