Nghia Do

Bonjour,

Nghia Do est situé à 80km au sud-est de Loakay.Au milieu des forêts épaisses,qui moutonnent sur les hauts massifs du Nord Tonkin,dans le fond d'un cirque aux parois abruptes:c'est dans une clairière cultivée,un petit centre de peuplement groupant quelques centaines de ThaÏs.
Un poste militaire français a été édifié pour protéger la population ralliée et barrer aux V.M,vers le nord,l'accès de la région frontière peuplée de Nungs et de Méos.

La garnison se compose de trente Européens dont quatre officiers encadrant une compagnie thaï et une compagnie de partisans.
En 1949,Nghia Do était couvert vers le sud,l'est et l'ouest,et relié à Laokay,le chef-lieu du sous-secteur,par les postes de Yen Binh Xa,de Pac Khoug,de Phorang,de Bao Ha et de Pho Lu.
Les uns après les autres,sous la poussée V.M,ces postes ont été repliés ou ont été enlevés par les rebelles qui,depuis quatre mois,dominent toute la région et ont coupé toute relation terrestre avec l'extérieur.Le poste n'est plus ravitaillé que par parachutage.

Celui de Pho Lu qui constituait le dernier relai « moral » avec Laokay a succombé début février après quinze jours de combats acharnés au cours desquels une compagnie parachutiste envoyée en renfort a été repoussée avec des pertes sévères,sans avoir pu faire liaison avec la garnison encerclée.
Depuis Nghia Do est désormais complètement isolé et... »attend son tour ».

Début février,le dispositif V.M d'encerclement n'est précisé et,de jour en jour,la zone contrôlée autour du poste s'est rétrécie.
Le 9,le lieutenant Vélléat avec une forte patrouille est allé attaquer un cantonnement V.M à Yen Binh Xa,mais au même moment les V.M ont déclenché une première attaque de nuit sur le poste,à la « bombe volante »(sorte de torpille de gros calibre).La patrouille n'a pu rentrer au poste que par un itinéraire détourné.

Les V.M occupent en nombre tous les mamelons boisés qui entourent la clairière,en certains points à moins de 200 mètres du poste.Ils le harcèlent par le feu jour et nuit.Avec des porte-voix,ils annocent leur attaque en masse imminente et incitent les partisans à déserter.Ils creusent des milliers de trous individuels,des tranchées,tissent un réseau de lignes téléphoniques.La garnison est sur le qui-vive,attendant l'attaque d'un moment à l'autre.
Le 22 février,dans l'après-midi,de toutes les crêtes qui entourent le poste,un feu d'une intensité inouïe se déclenche:canon de 75,mortiers de 81 et de 120,lance-torpilles,armes automatiques de tous calibres.
Le poste répond de toutes ses armes.
Sous les coups adverses,les murs d'enceinte du poste s'effondrent.Le poste construit en bois,couvert en paillote,se met à flamber.Les pieux qui soutiennent les gabions et les fascinages brûlent,les casemates que les obus ont épargnées s'écroulent,ensevelissant leurs occupants.

La mitrailleuses de 12,7 reçoit un obus de plein fouet,et peu après le canon de 3 pouces 7,qui tenait tête depuis des heures aux trois canons adverses,est atteint par un coup direct et se tait à son tour.

De toutes les lisières de la forêt,les rebelles se ruent alors à l'assaut en hurlant.Ils arrivent aux barbelé,lançant des paquets d'explosifs qui abattent les murs encore debout.Leur élan est brisé par le feu de la garnison réfugiée dans les tranchées.
Cependant,le poste continue à brûler.Le feu adverse,qui s'était calmé pendant l'assaut,reprend de plus belle:les canons (deux de 75 et un de 65 de montagne) tirent à 600 mètres,à cadence lente mais sans arrêt.

Dans la soirée,un nouvel assaut parvient jusqu'au pied du poste;il est repoussé;mais les V.M ont réussi à prendre pied dans les abris que les villageois ont creusé près des barbelés pour s'y réfugier le cas échéant.
La nuit est maintenant tombée.


à suivre...            

Le poste brûle toujours,les soutes à munitions gagnées par l'incendie sautent les unes après les autres.Le personnel dans les tranchées doit s'abriter contre les débris enflammés projetés de toutes parts.
Dans la rizière,illuminée par l'incendie,les V.M ramassent leurs morts et leurs blessés.
Par radio,le chef de poste a tenu Laokay au courant de la situation et demande de l'aide.Mais il sait qu'il ne pourra pas en recevoir à temps,Laokay,à quatre jours de marche à travers la montagne et la forêt,est de son côté pressé par de fortes unités V.M arrivant simultanément du Tonkin et de Chine.
On ne peut même pas espérer de l'aide de la chasse,car le plafond est bas-300 mètres à peine-plus bas que les chaînes de montagnes environnantes et ce serait olie pour l'aviation que de chercher à percer.

Le lendemain,au lever du jour,le reste est entièrement détruit,les grosses charpentes brûlent encore;de temps en temps,l'explosion d'une grenade ou d'un obus fait jaillir des gerbes d'étincelles.
A 9 heures,on entend un bruit d'avion au-dessus des nuages;on sent que l'appareil tourne pour trouver un trou et passer au-dessous.Un espoir naît chez les assiégés,de sentir que le monde extérieur essaie de prendre contact avec eux.

Le bruit du moteur décroit.L'avion n'a pas réussi à percer.La garnison du poste sent qu'elle est perdue.
La canonnade V.M qui avait ralenti reprend,puis une nouvelle vague d'assaut s'élance.Pour la troisième fois,elle est bloquée sous les barbelés.
Pour la garnison,la fin est proche;les pertes augmentent régulièrement.Il n'y a plus de grenades,plus d'obus de mortiers;il ne reste plus que quarante cartouches par hommes...
A 13 heures,nouveau bruit de moteur;cette fois-ci,on le voit,c'est un Morane qui survole le poste,et qui repart.
S'est-il rendu compte de la situation?
Et chacun sait que le prochain assaut sera le dernier...

Vers 14 heures cependant,un rayon de soleil perce le plafond.Les nuages montent peu à peu le long des masses de forêt d'un vert presque noir qui couvrent les parois du cirque montagneux.Puis quelques déchirures et les taches de soleil se font plus larges sur la rizière.

A 14h30,un nouvel avion survient cette fois,tourne autour du poste et disparaît.
C'est un Siebel de reconnaissance.
Le temps passe.Le ciel se dégage.Au sol,dans tous les angles morts,autour du poste,les V.M grouillent.
Le feu augmente de violence.Le poste répond à peine;ce sont les dernières cartouches;on les réserve pour le prochain assaut.

A 16 heures,deux avions de chasse débouchent dans le cirque et à la mitrailleuse attaquent les V.M qui se terrent dans leurs trous individuels.
Puis un JU52 apparaît,il tourne et,un à un,une quinzaine de parachutes se déploient.Mais qu'est-ce que quinze parachutistes-les V.M sont des milliers.Dans des conditions analogues,quinze jours avant,une compagnie parachutiste n'a pu débloquer Phu Lo.

Les paras sont tombés à 500 mètres du poste,au bout de la clairière,au pied des mamelons boisés qui bordent le pied de la montagne.On entend crépiter leurs mitraillettes.
Combien de temps tiendront-ils?...A 16h25 et à 16h30,puis à 16h40,un deuxième,un troisième et un quatrième JU52 largent chacun un stick au même endroit.
Quelques paras se trouvent au bord de la rivière et on les voit se battre au corps-à-corps.

Les V.M concentrent alors leur feu avec une violence accrue sur les avions et le mamelon occupé par les parachutistes...Ceux-ci n'ont pas plus de chance de s'en sortir que la garnison du poste.
Mais à 16h30,une vague de trois JU52 apparaît,puis une autre,puis d'autres encore.Le cirque de montagne résonne du bruit des 25 appareils qui tournent et,l'un après l'autre,larguent leur cargaison dont les voilures,par centaines maintenant,se déploient dans le ciel.

Le feu des V.M braqué sur les hommes qui descendent et sur les avions (sept appareils sont atteints) se ralentit et,de tous côtés,on voit l'adversaire se replier,regagner au pas de course de la forêt.

à suivre...

Le 15 février 1950,le 5ème BCCP,rentre à Hanoï après quarante jours d'opérations au sud de Hoa Binh,où il a été envoyé à pied pour dégager des postes encerclés.
Le personnel est fatigué,mais pense pouvoir compter sur quinze ou trois semaines de repos complet avant d'être à nouveau engagé.
L'armement et l'habillement sont envoyés en réparation,on remet le matériel en état.Les comptables régularisent les comptes de l'Intendance.

Le 23 février,à 9h45,le Commandant du bataillon est convoqué au PC du groupement aéroporté.Celui-ci lui notifie qu'il doit se tenir prêt à sauter avec son bataillon à partir de midi, au profit du poste de Nghia Do encerclé depuis plusieurs jours,qui la veille a signalé le caractère critique de sa situation et depuis ne donne plus signe de vie.
Il sera renforcé par un groupe de commandos (GC) du 3ème BCCP.

Le point où le bataillon doit sauter n'est pas déterminé,car l'avion de reconnaissance n'a pas réussi à reconnaître le terrain en raison des mauvaises conditions météorologiques.
De toute façon,il s'agit d'une opération aéroportée particulièrement dure:quinze jours auparavant,une compagnie parachutiste larguée au secours du poste de Pho Lu,voisin de Nghia Do,assiégé par des milliers de V.M,n'a pas pu faire liaison avec le poste,a subi des pertes sévères,et les V.M ont finalement pris le poste d'assaut.

Ignorant l'endroit précis de parachutage,le Chef de bataillon ne peut que mettre son unité en alerte et dire aux commandants de groupe de commandos:
« Nous sautons à partir de midi au profit du poste de Nghia Do,en Haute Région,qui est encerclé;baroud certainement très dur en arrivant au sol. »
C'est peu comme renseignements,mais les officiers ont fort bien compris.On connaît le genre de baroud que cela représente.Le « coup dur » de Pho Lu est présent à l'esprit de tous.
Par ailleurs,la « Haute Région » on sait quand on y part,on ne sait jamais quand on en revient.

A midi,il est notifié que l'avion de reconnaissance n'ayant toujours pas pu remplir sa mission en raison du temps (il a survolé la région du poste,mais sans réussir à passer sous les nuages),le briefing préparatoire aura lieu sur le terrain d'embarquement à 14 heures.
A 13h45,les camions quittent les cantonnements pour le terrain d'aviation de Bach Mai.A 14 heures,à la salle de briefing,aucune décision n'est encore prise quant « au point de chute ».On attend le Siebel de reconnaissance qui est reparti et va essayer,une fois de plus,de passer sous les nuages et de voir le poste.
Le temps passe.
Les aviateurs pressent le départ car la nuit tombe tôt.Les parachutes sont distribués,le personnel embarque dans les avions;les moteurs se mettent à tourner...


à suivre...

A la salle de briefing,où il ne reste plus que le Commandant de bataillon pour arrêter le plan d'opération avec les représentants de l'E.M du Tonkin,et le Commandant du Groupement Aéroporté,la question est toujours en suspend de savoir où l'on va saute car on ne sait pas si le poste tient toujours.
Enfin à 14h30,un radio passé par le Siebel fait connaître qu'il survole le poste de Nghia Do qui achève de brûler et est entièrement détruit;qu'il voit sur le poste de Nghia Do des panneaux « demande de vivres et de munitions » mais qu'il n'y a plus signe de vie;que toutes les crêtes sont tenues par les V.M,qui paraissent extrêmement nombreux;qu'en raison de la météo la chasse ne pourra pas intervenir.

Ceci est grave!Sauter dans ces conditions,sans l'appui de la chasse,présente un très gros risque!
Le Commandement du Groupement Aéroporté du Tonkin,chargé de la direction de l'opération de parachutage,décide qu'on sautera dans les rizières entourant le poste même.

C'est prendre le maximum de risques,car c'est le saut sous le feu direct de l'ennemi.C'est contraire à tous les réglements aéroportés.En effet,les parachutistes arrivant au sol empêtrés dans leurs parachutes sont extrêmement vulnérables.
En outre,dans les premiers instants,tous sont mélangés et il faut des délais (déjà longs sur un terrain d'exercice) pour que les chefs retrouvent leurs hommes,pour que les unités se regroupent et soient aptes à manoeuvrer.

Cependant,il considère,à juste titre,que seule l'impression causée à l'adversaire par des centaines de parachutistes tombant du ciel et donnant l'assaut dès l'arrivée au sol donne des chances de prendre le dessus,étant donné la situation.
Dès cet ordre formulé,il embarque sur l'avion leader d'où il doit diriger le parachutage.


à suivre...

Le Commandant de bataillon n'a même pas pu donner ses ordres en fonction de celui qu'il vient de recevoir.Tout son personnel est embarqué,les moulins tournent.Il demande aux aviateurs un quart d'heure de délai pour parler à ses officiers.Les aviateurs refusent:
« Les avions doivent décoller aussitôt:ils ont à peine le temps de transporter les paras,et de rentrer avant la nuit. »
Le Commandant de bataillon se concentre sur l'ordre à donner.

Par une chance inouïe,il connait un peu le terrain.Il est en effet passé l'année précédente à Nghia Do lors d'une opération menée avec un autre bataillon:le 3ème BCCP.
Depuis qu'il a été lui-même alerté,il a essayé de se remémorer les formes du terrain,la position du poste.
Il se porte près de l'avion leader,et appelle le chef du commando de pointe,celui qui va sauter le premier.C'est le Lieutenant Pouffier.
Il lui donne l'ordre suivant:
« Abandonnez les parachutes dès l'arrivée au sol.Attaquez immédiatement les crêtes qui se trouvent du côté opposé de la rivière par rapport au terrain de Morane sur lequel vous sauterez(1). »
Il donne également cet ordre aux officiers des avions les plus proches et envoie un officier,le Capitaine Nguyen-Van-Vy,en jeep,le transmettre directement aux chefs de stick qui sont tous embarqués.Lui-même s'équipe et s'embarque.

Le départ a lieu par vagues successives de trois avions.
Il a été prévu que l'embarquement et le décollage se feraient ainsi:
-Premier groupe de commando,7 avions;
-PC et stick de protection du PC,2 avions;
-Deuxième groupe de commando,8 avions;
-Troisième groupe de commando,7 avions.
La distance à parcourir est de 260 km,soit théoriquement une heure et demie de vol.Mais la route est extrêmement difficile à suivre.

Dès qu'on a quitté le Delta bien dégagé et qu'on aborde la Moyenne Région (on appelle ainsi la région des massifs peu élevés et boisés qui séparent le Delta de la Haute Région),on vole au-dessus du plafond,et les navigateurs ne peuvent qu'apprécier leur route de façon très approximative,se repérant plus ou moins bien dans les rares éclaircies.

En Haute Région,c'est encore pire.Il y a des nuages à toutes les altitudes,les avions volent à travers des chaînes élevées dont aperçoit un piton défilant à toute vitesse tout près de l'extrémité des plans.
L'année précédente,dans des circonstances analogues,un avion s'est écrasé sur une montagne avec tout son chargement de parachutistes.Il n'y a pas eu un seul survivant...

Bientôt les avions cessent de naviguer de concert et plusieurs se perdent.
Finalement,les avions arrivent au-dessus de l'objectif dans un ordre très différent de celui prévu au départ.
L'avion n°1 qui porte le Commandant de l'opération de parachutage et le premier stick du commando de pointe arrive effectivement le premier au-dessus de la DZ et largue son chargement.
Par contre,l'avion qui arrive et largue le deuxième est l'avion n°8 qui porte le stick de protection du PC du bataillon et l'avion qui arrive et largue en troisième porte un stick du deuxième groupe de commandos qui devait être largué en deuxième position seulement.

Une patrouille de chasseurs,qui a risqué le tout pour le tout pour aider les parachutistes,arrive à son tour et mitraille les rebelles au sol.A partir de 16h30,les avions arrivent en nombre et larguent pêle-mêle le gros des premiers et douzième commandos.
La réaction des V.M est violente;sept avions sont atteints par les balles.La précision du largage s'en ressent.Seul à partir de 17h30,le troisième groupe de commandos arrive et est largué selon l'ordre de départ.
A 18 heures,le largage est terminé.

(1)Il se souvient,en effet que le poste est au milieu des rizières,au fond d'une vallée et que la clairière est entourée de hauteurs boisées qui la dominent à courte distance de toutes part.
Il faut avant tout sortir du fond de la cuvette et prendre pied sur les hauteurs les plus facilement accessibles.

à suivre...

Bonjour,

Trente trois parachutistes ainsi que des gaines ont été larguées en dehors de la DZ,soit dans la rivière,soit dans les mamelons boisés autour;bien que beaucoup d'entre eux soient tombés dans les arbres et que l'un ait fait une chute de dix mètres de haut,deux hommes seulement sont blessés sérieusement à l'atterrissage;par contre,un grand nombre de parachutes sont déchirés.

Détail de parachutage (Extrait du journal de marche du 5ème BCCP)
A 16h10,le premier demi-stick du commando d pointe:lieutenant Pouffier,le radio,le chef de stick et une légère de quatre hommes sont largués.
Dès la sortie de l'avion,ils sont tirés de toute part (le soldat Bouteillez retrouve par la suite deux balles dans les boîtes de ration).
Le caporal-chef Grard,le caporal Schirer et le soldat Bouteillez tombent dans la rizière à l'ouest de la DZ,pris sous un feu violent,deux d'entre eux sont blessés presque aussitôt.

Un parachutiste (soldat Grux) tombe en plein milieu de rebelles à 4 mètres d'un FM.Il a heureusement sauté sa mitraillette à la main;il ouvre aussitôt le feu sans dégrafer son parachute et parvient à tenir ses adversaires en respect,récupérant même le fusil d'un de ses assaillants qu'il a tué.
Le lieutenant Pouffier,le sergent Marcesche et le radio Castille,tombés au bord de la DZ et tirés de très près par les V.M occupant le lit du ruisseau.
Ils bondissent à l'aide du premier demi-stick.
Le lieutenant Pouffier dispose les neufs hommes qui lui restent autour du FM et le petit groupe fait « la boule de feu »,utilisant les trous individuels des V.M et changeant de place continuellement pour échapper à la concentration de feu dont il est l'objet de toute part.(Grard,Schirer,isolés en pleine rizière sous une hutte,ne sont pas récupérables en raison du feu intense qui rase le terrain.Bouteillez,couché dans la boue,paraît mort;de fait,touché de deux balles,pris à partie par plusieurs FM,il fait le mort).

A 16h25,le stick de protection PC bataillon (sergent-chef Boutrit)atterit en bordure de DZ.
A 16h30,le stick Bessoneau avec le sous-lieutenant Volquemanne atterit sur la DZ (terrain de Morane) et se porte au mamelon au pas de course,renforçant encore Pouffier qui,combattant désespérément,améliore sa position et commence à prendre le dessus.
A 16h40,le stick du sergent Cargnelutti atterrit et se regroupe au nord de la DZ malgré un feu violent.
A 16h50,la masse des avions apparaît enfin et les V.M commencent à évacuer les abords du poste et le mamelon où se fait le regroupement.
A 17h15,le chef de bataillon et son PC sautent à leur tour.

Le chef de bataillon prend la liaison avec les commandants des GC2 et GC3,à qui il demande si le poste qu'on aperçoit,calciné et demi rasé est toujours tenu (le poste se trouve à peine à 400mètres).
Personne n'en sait rein.
Il donne l'ordre au GC2 d'attaquer les mamelons nord-ouest du poste et d'envoyer un commando au poste même.
A ce moment,une vive fusillade éclate.C'est la garnison du poste qui effectue une sortie sous le commandement du lieutenant Vélléat,abat tous les V.M qui,pris entre le poste et les parachutistes,se sont terrés.

La liaison est faite avec le poste à 18h15 et à 18h20,le chef de bataillon prend contact personnellement avec le chef du poste.

à suivre...

Les abords du poste sont jonchés de débris projetés par l'explosion d'une des soutes à munitions.Le poste est entièrement détruit et brûle encore,des cadavres carbonisés gisent au milieu des ruines.La garnison est dans un état d'épuisement total.
De 16h15 à 17h45,une accalmie de feu relative s'est produite du côté des V.M qui évacuant les abords du poste et les mamelons Ouest et Nord,poursuivis par les parachutistes qui en tuent un grand nombre et récupèrent armes et munitions.

A partir de 17h45,les V.M se regroupent sur les pitons Est et Sud,et prennent à nouveau sous un feu violent les avions qui larguent le troisième groupe de commandos,dont deux hommes sont blessés au cours de la descente.

A 18h30,le troisième groupe de commandos (GC2 du 3ème BCCP) est entièrement arrivé et regroupé sur la DZ dans l'angle d'un ruisseau aux rives boisées qui présente un couvert relatif.
A 18h40,le chef de bataillon,rentré du poste,donne les ordres pour la nuit.
Sur les mamelons,les groupes de commandos sont répartis autour de la cuvette dont nous sommes maîtres,sauf sur la bordure Nord et Est où les V.M sont solidement installés et d'où ils tiennent sous leur feu le terrain de Morane.

Le PC,le poste radio et le poste de secours sont installés dans un ravineau,après que l'officier de transmission et ses opérateurs aient chassé les V.M qui rampent dans les broussailles.
Le médecin-lieutenant Mirtin et l'assistante sociale Geneviève Grall donnent les premiers soins aux blessés.
La nuit tombe.

Dans le poste,la garnison qui a « tenu » jusqu'à l'extrême limite de ses forces,s'abandonne à son épuisement,mission remplie.

Mission remplie aussi pour les parachutistes qui,dans l'ombre,disputent aux Viets les parachutes qu'il faut à tout prix récupérer,et achèvent de se regrouper pour reprendre le combat à l'aube.



Source:Debout les Paras.

Le lendemain,les Viets contre-attaquent à leur tour,cette fois depuis l'autre côté de la rivière.Le GC2/3ème BCCP du lieutenant Leroy et le GC3/5ème BCCP du lieutenant Florentin traversent le cours d'eau sous le feu et parviennent à les repousser dans la forêt avec des pertes sévères.
Excellent tireur,le lieutenant Leroy abat les servants de deux mitrailleuses au fusil à lunette,mais il ne peut empêcher les Viets de récupérer les pièces.

Entre-temps la chasse est intervenue et vers 16 heures,les Viets décrochent enfin.Tout le terrain est contrôlé par le groupement du Chef de bataillon Romain-Desfossés,tandis que la garnison s'affaire à restaurer les défenses du poste.

Le groupement Romain-Desfossés évacue Nghia Do et se dirige sur Pa-Kha à partir du 10 mars 1950.

Merci pour ce récit passionnant et très détaillé de la bataille de Nghia Do.

J'ai pas trouvé mieux comme carte....

Le dégagement des postes dans les endroits difficilement accessibles c'était aussi le boulot des paras d'Indochine, qui mieux que le colonel Romain-Desfossés pour en parler:


Certes, c'est en Indochine que les Paras Français ont conquis leurs plus beaux titres de gloire qui leur ont valu leur prestige mondial.
Certes, le mythe qu'ils se sont créé là-bas repose sur des valeurs guerrières authentiques et magnifiques.
Certes, ils furent le «fer de lance», ceux des situations désespérées dans lesquelles tant d'assiégés survivants leur durent d'être sauvés.
Mais ils n'eurent pas le monopole de l'héroïsme, car, de l'héroïsme, il y en eut partout.
Je me souviens de ces petits postes perdus en brousse, tenus par une vingtaine de partisans à la tête desquels on mettait un petit gradé ou un gendarme arrivant de France et ne connaissant ni le pays, ni la population, ni même le langage de sa propre troupe.

Ils étaient noyés dans la jungle, isolés du monde, ravitaillés de façon précaire par de rares convois, puis, l'encerclement se resserrant, ils ne recevaient plus leurs rations et leurs cartouches que par des parachutages, ne pouvant évacuer ni leurs malades ni leurs blessés.
Ils tenaient pendant des semaines, des mois et des mois sans que l'on puisse assurer leur relève.
Si, à nous, Paras, on donnait des missions de sacrifice pour tenter de les sauver, eux aussi assumaient une mission de sacrifice pour tenir le poste qui leur était confié comme un navire à son Commandant.
Submergés par les assaillants, ils se battaient jusqu'aux «dernières cartouches» parce qu'au-dessus d'eux flottait un drapeau qui signifiait que la France était là.
Je me souviens de Phu Nho Quan où une Compagnie de Coloniaux fut presque anéantie sans que les Viets puissent s'en emparer et qui fut remplacée par une Compagnie de Légionnaires qui se battit avec le même héroïsme.
Il y en eut en Indochine des Bazeilles, des Camerone, des «mini Dien Bien Phu», sans Paras et dont on n'a jamais parlé !
Et je me souviens aussi de ce que j'ai ressenti lorsque, mis en alerte pour secourir le poste de Nghia Do encerclé depuis des jours et dont la radio ne répondait plus, on me montra le message émis par l'avion de reconnaissance :
«Poste entièrement détruit et en flammes. STOP - Vu panneaux de demande vivres et munitions. STOP - Aucune trace de vie dans le Poste. STOP - Le Drapeau flotte encore. FIN DE MESSAGE».
Les Marsouins avaient accompli leur mission.
Celle des Paras commençait.
Cette Guerre d'Indochine, qui dura neuf ans à douze mille kilomètres de la Métropole, est certainement le plus bel exemple que l'on puisse trouver dans l'Histoire de notre pays, des vertus militaires de l'Armée de métier française.
Tous nos soldats s'y sont sacrifiés jusqu'au bout,
Pour l'Honneur.


Et de ce point de vue les "petits" Thaï de Nghia Do n'ont pas démérité.

Impressionnant en effet...
ça m'évoque la faillite de l'éducation nationale, qui ne parle pas de ces batailles héroiques de la guerre d'Indochine, et par contraste la belle tenue de l'enseignement militaire avec ses feuilles de route de promotions (je ne sais pas comment les appeler autrement), comme celle de Puy-Montbrun (par exemple), avec la bio, la prière, l'insigne...
d'un côté, la négation, de l'autre une vraie richesse culturelle... mais on ne s'adresse peut-être pas au même public...

Bonjour,

georges a écrit:

mais on ne s'adresse peut-être pas au même public...

Effectivement...

Bonjour ,

Comme d'habitude , Manta nous a fait un tour d'Horizon de Nghia-do complet ! Debout les Paras est une aubaine ...Il existe toujours ?

Je n'ai jamais eu la chance d'en trouver en brocante ... "DLP" et "beret rouge" sont jalousements conservés par leurs propriétaires ...Est-ce qu'il y a une complile CD ?

" Cette Guerre d'Indochine, qui dura neuf ans à douze mille kilomètres de la Métropole, est certainement le plus bel exemple que l'on puisse trouver dans l'Histoire de notre pays, des vertus militaires de l'Armée de métier française.
Tous nos soldats s'y sont sacrifiés jusqu'au bout,
Pour l'Honneur. "

Romain-Desfossés savait de quoi il parlait ... Car il n'a pas toujours été Colonel ...

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Je vous en ai mis un ici ... Dans l'indifference generale....

A noter que "Beret Rouge" se nommait " allo Ancre ...Ici Dragon" avant d'etre etendu aux paras metro...

Je peux vous mettre une petite deux-centaine de scans en ligne... si cela interesse

Lu; en pensant tristement que toutes ces belles pages pleines de héros oubliés, de faits qui tiennent du miracle même s'ils sont terribles et dramatiques, tout cela tombe déjà dans l'oubli (depuis longtemps oubliés en fait), ils sont même reniés, voire critiqués, ensevelissant à nouveau ceux qui sont morts ou jamais revenus.

Que dire de leurs familles et copains que n'écoutent plus que ceux qui savent, mais ils sont rares ceux qui savent et ils disparaîtront eux aussi.

Ce n'est pas listé au Patrimoine mondial. Cela passe à la trappe car ce fut colonial. A la trappe les héros qui n'avaient rien demandé mais qui ont fait plus que leur devoir.

Lu aussi et merci pour toutes ces pages ..
Le premier devoir de mémoire n'est point de donner de stériles regrets sur le passé , mais de faire garder à la mémoire la volonté de vouloir faire exécuter une perpétuelle reconnaissance des souvenirs et de ceux qui ont fait que nous , nous ayons l'honneur de pouvoir aujourd'hui avancer sur leurs pas à travers toutes ces écritures .

Paracolo a écrit:

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Je vous en ai mis un ici ... Dans l'indifference generale....

A noter que "Beret Rouge" se nommait " allo Ancre ...Ici Dragon" avant d'etre etendu aux paras metro...

Je peux vous mettre une petite deux-centaine de scans en ligne... si cela interesse

Bonjour ,



Tu es dur avec nous ... " Indifferénce générale ... " Je crois qu' il n'y a pas eu de connection de membres du forum , ce jour là ... Et pour ma part , je pensais que c'était seulement un exemplaire que tu mettais en ligne ... " OUF , on s'en sort à peu pres bien , pour cette fois ... "

Quand à mettre tes scans en ligne , tu penses bien que l'on est d'accord ... Nous te faisons confiance pour le choix des sujets .

J'ai eu l'occasion d'en lire quelques uns en 66 ,, des Berets Rouges , et malheureusement à cette époque , je n'avais pas l'intéret que je porte maintenant aux TAP ... C'est donc tombé aux oubliettes ...

B O , :

" Ce n'est pas listé au Patrimoine mondial. Cela passe à la trappe car ce fut colonial. A la trappe les héros qui n'avaient rien demandé mais qui ont fait plus que leur devoir ... "

A part quelques " conscients " comme nous , il y à belle lurette que les Français s'assoient sur leur patrimoine militaire surtout si en plus il est colonial ...

Le service national pouvait pallier un peu à ce désert ... Mais maintenant , que peut-on espérer ...



La transition " Allo Ancre , ici Dragon " => " Beret Rouge " date de quand ?

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Le 1er Janvier !959 Beret Rouge remplace Allo Ancre Ici Dragon...