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LIO21121 sur PTH[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]CUERNICA ou GERNIKA
Le 26 avril 1937, jour de marché, quatre escadrilles de la légion Condor, protégées par des avions de chasse italiens, procèdent au bombardement de la ville de Gernika afin de tester leurs nouvelles armes. L’attaque commence à 16h30, aux bombes explosives puis à la mitrailleuse et enfin aux bombes incendiaires. Après avoir lâché quelques 50 tonnes de bombes incendiaires, les derniers avions quittent le ciel de Gernika vers 19h45. Après le massacre, 20% de la ville était en flammes, et l’aide des pompiers s’avérant inefficace, le feu se propagea à 70% des habitations.
LA GUERRE CIVILE ESPAGNOLE
17-20 juillet 1937. En tout juste quatre jours, ce fut le chaos. Les premières heures apportèrent leur lot d'insécurité, de craintes et d'incertitude. Parfois, la violence éclata dans les rues. Moments de folie collective lors desquels chaque groupe tenta d'annihiler son adversaire... Peu à peu, commença à devenir évident à quel point la réalité avait changé. Il n'était plus possible de prendre un train pour n'importe quelle destination. Des gens ne pouvaient communiquer avec leurs proches, d'autres tentaient de passer inaperçus et beaucoup cherchaient à fuir mais ne purent parvenir à leurs fins.
L'Espagne en guerre était divisée en territoires amis et ennemis. Manger, travailler, penser, se mettre en relation les uns avec les autres et avec le propre entourage, n'étaient plus chose courante. Soudain la paix s'évanouit et, avec elle, la vie même.
LE BOMBARDEMENT DE GERNIKA
Les gens de Gernika vécurent dès le début les ravages de la guerre, même si les premiers mois l'atmosphère de la ville n'en fut pas excessivement altérée. Dans un premier temps, la normalité ne se vit perturbée que par quelques arrestations. Puis, les jeunes de la ville commencèrent à s'enrôler dans les bataillons de Gudaris. Suivit bientôt la mobilisation des premières classes, la militarisation des entreprises locales et le rationnement.
A mesure que le front se rapprochait, les effets directs de la guerre prenaient de plus en plus d'ampleur. On vit arriver les premiers réfugiés et passer des bataillons de gudaris qui battaient en retraite. Un hôpital d'évacuation fut installé dans le Collège des Carmélites. Les nouvelles sur le déroulement de la guerre rapportées par des témoins se mêlaient à des rumeurs alarmantes. Le 31 mars 1937, l'armée de Franco bombarda Durango et la peur commença à se répandre dans la population. Les autorités locales ordonnèrent la construction de plusieurs refuges antiaériens. Et ce fut le 26 avril 1937. Lundi. Jour de marché.
Le premier avion apparut dans le ciel vers quatre heures de l'après-midi et largua quelques bombes. Au bout d'un quart d'heure environ, ce fut la première vague, trois avions en formation triangulaire qui volaient très bas. Ainsi commença le bombardement systématique de Gernika, lequel allait se prolonger plus de trois heures.
Les aspects techniques du bombardement de Gernika demeurent à ce jour l'un des thèmes les plus passionnants de l'histoire contemporaine. La destruction de Gernika fut le fait de la Légion Condor allemande et des forces aériennes italiennes, agissant sous les ordres des putschistes de l'armée franquiste. La tactique militaire appliquée fut si dévastatrice que Gernika est passée dans l'histoire comme le premier essai de guerre totale.
Les avions décollaient de l'aérodrome de Vitoria, dépassaient le littoral puis faisant demi tour, suivaient la vallée du Oca, pour attaquer Guernica du Nord au Sud. Selon toute vraisemblance, les appareils étaient de trois types : Heinkel 111 et Junker 52 de bombardement et Heinkel 51, qui sont des avions de chasse dotés de mitrailleuses. Ils devaient former deux vagues, qui se relayaient tour à tour. Quant au nombre de chacune, une polémique générale existe à ce sujet. Pour clarifier, on peut parfaitement supposer que dans chaque vague intervenaient, bombardiers et chasseurs réunis, de 15 à 20 avions.
C'était suffisant. Leur tactique consistait à jeter en premier des bombes brisantes ordinaires, puis des grappes de petites bombes incendiaires et, simultanément, à mitrailler les gens à découvert, non seulement ceux qui se trouvaient dans la ville, mais aussi dans ses environs et même dans les communes des alentours.
Après le bombardement, Gernika se retrouva pratiquement rasée. A la destruction provoquée par l'attaque aérienne, il fallait ajouter l'incendie qui se propagea dans le centre de la ville, attisé par le vent qui souffla dans les heures suivantes. Les pertes humaines demeurent difficiles à quantifier, même si les calculs les plus couramment acceptés évoquent 250 morts et des centaines de blessés.
La plupart des victimes périrent dans les refuges ou du fait de mitraillages en rase campagne. A la tombée du jour, nombre d'habitants abandonnèrent la ville, qui était toujours en feu, et dans le désarroi du moment, nul ne fut exactement en mesure de dire combien de ses voisins avaient perdu la vie dans l'attaque.
Il resta peu de bâtiments debout. Quelques maisons, les fabriques d'armes, le pont de Rentería. La Casa de Juntas et
l'Arbre de Gernika étaient inexplicablement intacts, de même que l'église de Santa María. Le visage urbain de Gernika s'estompa complètement et apparut couvert de décombres. L'emplacement de la foire, le fronton et le boulevard de San Juan ne restèrent que dans le souvenir de ceux qui y avaient passé certains moments de leur vie, sans doute plus heureux.
Quand le bombardement cessa, les gens sortirent de leurs refuges. Personne ne pleurait. Les visages exprimaient la stupeur. Personne parmi nous ne donnait crédit à ce qu'il voyait. A la tombée du jour, on ne pouvait pas voir à plus de 500 mètres. De toutes parts, les flammes causaient des ravages et il montait une épaisse fumée noire.
Les troupes nationales firent leur entré dans Gernika trois jours après le bombardement. Le contingent militaire franquiste se composait d'Italiens, d'Allemands, de Maures et de requetés. Beaucoup avaient fui par crainte des représailles, notamment ceux qui étaient connus comme républicains et nationalistes. Dans les premiers jours, les soldats distribuèrent du pain et de la nourriture parmi la population. Mais peu à peu se firent sentir les effets de la pénurie et du rationnement.
Les troupes maures furent cantonnées en divers lieux de la ville, entre autres dans l'église de Santa María. Ultérieurement les femmes de Gernika furent contraintes de laver à grande eau ces endroits profanés. Cet épisode fut l'une des humiliations qui laissa l'empreinte la plus profonde dans leur mémoire.
Le bombardement prit de court tous les habitants de Gernika. Y compris ceux qui, alertés du danger, n'auraient jamais pensé à une attaque d'une telle intensité. Quand les premières bombes tombèrent, les gens cherchèrent à s'abriter dans les endroits qu'ils jugeaient les plus sûrs ou simplement dans ceux qui étaient à leur portée. Outre les refuges municipaux, on pouvait également se rendre dans les usines, dans les caves à vin et dans les sous-sols des bâtiments. Il y eut des gens qui choisirent d'abandonner la ville pour se cacher sur les hauteurs, dans les broussailles, dans les vergers et dans les fermes, y compris dans les fossés.
L'expérience du bombardement fut horrible pour eux tous; peur, angoisse, insécurité, incertitude et sentiment de vulnérabilité. Beaucoup d'habitants passèrent les longues heures que dura l'attaque aérienne dans l'inquiétude pour leurs proches qui n'étaient pas à leurs côtés. Ceux qui ont pu expliquer leur expérience évoquent le manque d'air dans les refuges, les pleurs des enfants et les prières. Quant tout fut fini, ce qu'ils ressentirent fut quelque chose de semblable à une profonde confusion, faite de désarroi, d'incrédulité et de stupeur devant une vision qui les laissait incrédules.
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