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Reprenons donc le récit là où nous l’avons laissé…
La France Libre s'appelle désormais la France Combattante…
C’est dans ce contexte que les bérets verts commencent à se mettre en évidence au combat : Quatorze seront à l'honneur avec leurs camarades anglais et canadiens.
Ils ont pour mission de détruire à Varengeville une batterie de 6 canons allemands braqués sur les plages et le port de Dieppe où doivent aborder d'autres forces.
Cette mission est capitale pour la réussite de l'ensemble de l'opération.
Le groupe Français a un canon à charge, il supprime la garde en douceur et fait sauter l'engin. Si les Français réussissent, il n'en est pas de même sur la plage, où s’entassent des
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Le Chef des Français, le Lieutenant Francis Vourc’h et six camarades sont indemnes sur place, trois autres ont pu se rembarquer…
Montailler, blessé, est achevé par un feldwebel. César est capturé, il s'évadera en sautant du train qui l'amenait en captivité…
…Recueilli, restauré, il repart et rejoindra l'Angleterre avec les dix autres indemnes, par des chemins divers et avec obstination.
Cette opération coûteuse mais non inutile aura permis de constater l'impossibilité d'arracher un port, d'où l'idée d'opérer sur des plages dégagées au moyen de caissons préparés.
En novembre 1942, débarquement allié en Afrique du Nord…
Le 31 janvier 1943, le maréchal von Paulus capitule à Stalingrad…
En Angleterre nos fusiliers marins sont maintenant très pris au sérieux…
Ils piaffent et ils savent aussi que leurs actions de guerre sont d'autant plus dangereuses qu'en octobre 1942, Hitler ordonne de refuser toute pitié aux commandos capturés, bref de les éliminer.
Lofi est maintenant dans le coup.
C'est ainsi qu'il devient l'instructeur des volontaires de Treppel.
Il mènera la parade du 14 juillet 1943, en attendant la suivante en France…
Il a déjà rattrapé son retard sur ses camarades plus anciens.
La Corse se libère, le 24 septembre 1943.
Les commandos Français participent en équipes mixtes à des raids de reconnaissance en France et en Hollande, alors que les bérets verts norvégiens s'emploient à la bataille de l'eau lourde en leur Pays, les belges renforcent les maquis yougoslaves, les polonais s'activent en Italie...
Les Français, le 25 décembre, sont de l'expédition sur l'île de Serq avec mission de ramener l'officier allemand y commandant… La réussite ne sera pas à la clé.
D'autres raids ont Gravelines et l'île de Jersey pour finalité…
De Gravelines, il convient de ramener des mines et du sable, tout en estimant les forces ennemies…
Les Français sont à bonne et rude épreuve.
En 1944, l'Angleterre est devenue une gigantesque base d'invasion.
L'équipe Française se renforce en tous points, en hommes et en matériel avec un service médical bien doté et même un aumônier en la personne du Père De Naurois, Capitaine d'artillerie de réserve…
Le 26 mars, l'équipe, forte de 180 hommes, prend l'appellation de 1er bataillon de fusiliers marins commandos.
Il est affecté au 4e commando du Lieutenant Colonel Dawson…
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Maurice Chauvet, badge 119 Le 25 avril, ils reçoivent leur insigne dessiné par l'un des leurs Maurice Chauvet…(
Qui sera conseiller du film Le Jour le plus long)
La description héraldique de l'insigne est la suivante :
« Sur un écu de bronze, qui est de France, portant au centre le brick de l'Aventure supporté par des vagues, surchargé d'un poignard Commando, dirigé du canton senestre du chef au canton dextre de la pointe, et décoré d'une Croix de Lorraine dans le canton dextre du chef.
L'écu repose sur un ruban portant l'inscription "1er Bataillon F.M. Commando".
Ses deux extrémités repliées montrent deux petites ancres rappelant l'origine marine de l'Unité. »
Les badges numérotés sont tirés au sort, sauf pour Kieffer, qui s'attribue le n° 1. Lofi portera le n° 63…
Ceux morts ou disparus ne sont pas oubliés…
Le jour "J" approche…
Nos bérets déjà porteurs de secrets, comme d’autres troues, sont mis au secret…
Il est absolument défendu de sortir du camp gardé par des sentinelles qui ont ordre de tirer.
Les commandos de Kieffer sont rassemblés le 5 juin.
Le Général Lord Lovât, leur chef, s'adresse à eux pour annoncer le débarquement imminent en terminant son allocution en Français :
"Mes Amis, commandos Français, demain on les aura".
Le pacha (Cdt Kieffer) explique au bataillon qu'une rude et noble tâche les attend, en précisant qu'il fallait s'attendre à 50 % de pertes…
Ce chiffre, nous le verrons, sera dépassé.
A Lofi, il dira, ce sera toi, ce sera moi (
Kieffer dira aussi de Lofi "un Lorrain solide et toujours jovial").
Le soir, ils s'embarquent sur leurs barges où ils vont vivre la nuit la plus longue près de Portsmouth.
Le commando, qui porte le n° 4, est scindé en 2 troops (
Les troops, dans un commando, suivant le type anglais, sont l'équivalent d'une compagnie réduite d'infanterie et possèdent un effectif variable de 5 à 6 officiers et 70 hommes) …
…la 1ère, commandée par l'Enseigne de vaisseau Guy Vourc’h et la 8e par le Capitaine Alexandre Lofi.
Cette dernière est armée de 4 fusils mitrailleurs Bren, de 8 pistolets mitrailleurs Thompson, de 3 pistolets Colt 45, de 2 lance-flammes portables, de 30 fusils Enfield, de 2 fusils de précision Springfield et 2 lance-roquettes.
Chacun porte 6
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], 2 grenades Stricker et 2 Gamon bomb.
L'ensemble est sous commandement britannique.
La troupe 8 prend place sur la barge 527.
Sur la base de cartes distribuées, les missions sont déterminées… Pendant que la BBC diffuse les vers de la chanson d'automne de Verlaine (
Lorrain lui aussi, puisque Messin)
"Les sanglots longs des violons d'automne bercent mon cœur d'une langueur monotone"
A 4 heures, le 6 juin, le ciel se déchaîne…
L'aviation alliée s'acharne sur les installations côtières ennemies… A 5 h 30, les bâtiments de guerre ouvrent, à leur tour, le feu sur leurs objectifs.
Les hommes font leurs derniers préparatifs : vérification, ajustage et des mots d'encouragement.
Lofi lance "Alors, cette fois, ça y est. Nous revenons en France et en Vainqueurs".
Ils ne seront toutefois pas les premiers français à débarquer, les paras français, on l’oublie trop souvent ont
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], peu après minuit, en mission de couverture de l’assaut du 6 juin…
Le caporal Bouëtard du stick Marienne, est déjà mort, alors que les parachutistes des 82e et 101e divisions US sautent sur Sainte-Mère-Eglise…
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Le caporal Emile Bouëtard
- A 6 heures, les barges se rapprochent de la brèche de Colleville d'où la troupe 1, pénétrant dans Ouistreham doit prendre à revers un blockhaus en pleine ville devant l'hôtel St-Georges pendant que la 8, celle de Lofi, doit nettoyer les fortins sur la plage.
- A 6 h 45, est entrevue la terre de France, lorsque se dévoilent trois canons ennemis qui prennent à partie des démineurs anglais, déjà débarqués, pour dégager un passage.
Le tir s'allonge sur les bâtiments.
Le lieutenant-colonel Dawson laisse les deux barges Françaises n° 523 et 527, celles de Kieffer et de Lofi, prendre de l'avance, afin de permettre à des Français de prendre, les premiers, pieds en leur Pays.
Geste chevaleresque anglais fort apprécié.
- A 7 heures, la terre est touchée.
Débarquement hallucinant d'autant que la barge de Lofi, touchée, est disloquée mais ils s'en sortent, les mines n'explosent pas mais le tir allemand est précis…
Laissons lui la parole:
"Ma seule pensée fut pour ma famille. Je me suis dit : « Les carottes sont cuites. Vous imaginez... débarquer devant un feu aussi nourri. Devant nous 400 mètres de plage minée restaient à couvrir avec des barbelés partout et des engins anti-débarquement (
les asperges de Rommel).
Comme toujours dans ma vie, j'ai eu la baraka. Les anglais m'avaient d'ailleurs surnommé "The lucky man". Je n'ai eu aucun blessé lors de la traversée de la plage. Un vrai miracle. Il fallait faire vite".
Le Commandant Kieffer, lui, est blessé, d'entrée de jeu, par un éclat d'obus dans les ruines de la Colonie de vacances de Colleville…
Allongé, il donne ordre de progresser sous les ordres de Lofi, qui, pistolet au poing, hurle des encouragements aux retardataires qui s'infiltrent, avec les autres, en rampant dans les brèches faites dans les barbelés.
Appliquant à la lettre la tactique étudiée, Lofi entraîne ses hommes vers les petits blockhaus. Il est légèrement blessé et atteint une grande maison où ils sont pris sous le feu.
Ils quittent ce lieu qui est aussitôt pulvérisé…
Appuyés par leurs feux, se masquant par des fumigènes, ils avancent mais les allemands veillent.
Les blessés et les morts s'accumulent, parmi eux le médecin, le Dr Lion.
L'aumônier, le père de Aurois traverse, indifférent, la mêlée en montrant un courage admirable…
Le temps passe...
Il est 8 h 30, la troupe 1, celle de Vourc’h, atteint la ville mais n’y progresse que lentement devant les obstacles à surmonter.
Les tireurs d'élite allemands ne chôment pas, les bérets verts non plus mais ils sont à mains nues devant les fortifications.
Kieffer, soucieux de sa mission, pansé et soigné, revient de la plage sur l'arrière d'un char, d'où il commande…
Pendant ce temps, les hommes de Lofi de la troupe 8 achèvent le nettoyage des blockhaus côtiers…
Ils reçoivent l'ordre de rejoindre et d'épauler la troupe 1.
Les allemands se rebiffent… Lofi progresse, bien que pris sous un tir de mortier, alors que Kieffer fait tirer son char pour neutraliser le blockhaus du casino et le belvédère encore menaçant.
Tout se fait calmement, méthodiquement…
Au tableau de chasse, la destruction non prévue d'un central téléphonique signalé par un civil…
Les premiers allemands se rendent, il est 11 h 30. Le calme revient, les bérets verts ont gagné mais le débarquement, en son ensemble, s'opère difficilement, les allemands ayant pleinement réagi.
Kieffer, à nouveau blessé, ramène ses hommes, mission accomplie, vers la colonie de vacances de Colleville, où ils pourront souffler, se restaurer et se recompléter pour repartir, bien exténués, vers le bourg de Colleville et Saint-Aubin d'Arquenay…
...Mais à Bénouville ils sont, à nouveau, pris à partie par des tireurs embusqués dans un clocher. Ceux-ci sont rapidement débusqués et neutralisés.
Lofi relance jusqu'au pont métallique qui enjambe le canal de l'Orne, pont qui deviendra célèbre sous le nom de "Pegasus bridge"…
Ses hommes doivent le passer...
Les rambardes offrent des protections. Ils y arrivent malgré le feu ennemi pour se joindre, selon ordre, aux parachutistes… De nouveaux blessés qui seront pansés dans le non moins célèbre Café "Gondree".
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Pegasus Bridge en 1944 Les bérets verts de Kieffer auront hardiment et victorieusement combattu en parcourant, en ce jour le plus long, 14 kilomètres.
Ils s'arrêteront pour la nuit à Longueville.
Le Colonel Dawson, avare de paroles, dira seulement: "Magnifique Lofi, du beau travail".
Les survivants subissent le choc en retour du combat…
Les sentinelles tressaillent au moindre souffle de vent…
Ils réalisent à peine d'être en France et être les premiers Français à la libérer…
Nombreux d'entre eux avaient été condamnés à mort par Vichy pour désertion, en 1940. D'autres Français, ne l’oublions pas, auront aussi contribué à ces premières heures de la Libération à savoir de nombreux marins et aviateurs, les parachutistes des SAS qui ont sauté en Bretagne et d'autres commandos isolés… (
Curieusement l’histoire officielle oubliera plus ou moins tous ces combattants du premier jour, pour, à l’instar de ce qui s’est passé avec la « victoire de Montcornet » ne retenir que la 2e DB , qui ne débarquera que le 1er Août)
Kieffer, bien secoué, accepte le 8 juin de se faire évacuer après avoir confié le commandement à l'Officier des équipages Lofi (
qui devient ainsi le pacha) dont les deux troupes auront à faire face dans la journée à une contre-attaque engagée par des éléments de la 12e division de la Hitlerjugend...
Des journées de poudre et de sang, car les allemands continuent à s'accrocher, bien que sonnés. Les jours suivants, encore deux contre-attaques qui sont repoussées.
Kieffer de son lit d'hôpital écrira : "L'officier des équipages Lofi,
avec l'initiative propre aux commandos, avait montré pendant mon
absence, toute sa valeur et s'était fait une solide réputation près des
Britanniques"...
De Gaulle, lui, pourra revenir en France, le 14 juin.
Pendant 23 jours, les commandos Français patrouillent au contact de l'ennemi dans le secteur d'Angeville…
...De multiples petits accrochages ont lieu illustrant le style de Lofi. Ainsi, le 20 août, en tête de sa troupe, il entend une sommation gutturale en langue allemande, langue qu’il comprend parfaitement, la réponse jaillit brutalement dans l'éclatement de deux grenades lancées par lui. Il peut poursuivre.
La situation alliée se raffermit et nos commandos peuvent s'avancer plus en avant dans les terres mais leur savoir-faire les appelle ailleurs… .
Ils quittent, au bout de 83 jours le sol de France, en y laissant 21 morts et ayant eu 93 blessés…
Plus de la moitié de l'effectif engagé !
A suivre...
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